La commission des affaires culturelles du sénat auditionne l’UNI

Par UNI Archives

Le 8 décembre 2003 à 0h00

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Situation des universités

– Audition de M. Olivier Vial, délégué national de l’Union nationale universitaire (UNI)

La commission a tout d’abord procédé à l’audition de M. Olivier Vial, délégué national de l’Union nationale universitaire (UNI).

A titre liminaire, M. Jacques Valade, président, a rappelé le contexte dans lequel s’inscrivait cette série d’auditions, alors que deux thèmes focalisent les revendications actuelles d’une partie des étudiants : d’une part l’harmonisation des diplômes en Europe, par la réforme « licence-master-doctorat » (LMD), initiée en 1998 et, d’autre part, le projet visant à renforcer l’autonomie des universités.

M. Olivier Vial a, en premier lieu, souligné que le mouvement étudiant mis en exergue dans les médias, et qui a été lancé au lendemain du Forum social européen, n’avait rien d’un mouvement de masse, dans la mesure où il ne concerne que 10 à 30.000 manifestants, sur une population totale de 2,2 millions d’étudiants.

Il a en outre fait remarquer que le système « LMD », déjà mis en place dans 17 universités ne participant pas, par ailleurs, au mouvement, n’entrait pas en contradiction avec le modèle universitaire français dont l’ambition internationale est intrinsèque, cela d’autant plus qu’un récent sondage a révélé que 87 % des étudiants étaient favorables au développement de diplômes européens.

Il a néanmoins mis en lumière deux principales faiblesses de l’université française, à savoir les difficultés à répondre à la massification de l’enseignement supérieur ainsi qu’à établir une véritable égalité des chances entre les étudiants tout en indiquant que le contexte actuel, marqué par une stabilisation des effectifs et par un début de rattrapage budgétaire dans le projet de loi de finances, était propice à l’engagement de réformes profondes.

Tout en rappelant que leur insertion professionnelle occupait le premier rang des préoccupations des étudiants, M. Olivier Vial a fait observer que quatre étudiants sur dix optaient pour des filières sélectives ou professionnalisantes, tandis que les premiers cycles universitaires enregistraient des taux d’échec massifs, moins de 17 % des bacheliers professionnels parvenant à obtenir le diplôme d’études universitaires générales (DEUG) au bout de 5 ans, ce qui représente un réel gâchis à la fois humain et financier.

Il a ensuite regretté, d’une part, qu’un trop grand nombre d’étudiants s’engagent dans des filières n’offrant que peu de débouchés, et, d’autre part, que l’éloignement de l’université du monde de l’entreprise ne conduise à une relative défiance de ce dernier vis-à-vis des étudiants des trois cycles universitaires, auxquels sont souvent préférés les diplômes des grandes écoles.

Face à ces difficultés, M. Olivier Vial a souligné les apports positifs de la réforme LMD, qui ouvre de plus grandes possibilités de réorientations tout au long des cycles universitaires et permet de concilier une meilleure lisibilité des diplômes et une plus grande diversification des parcours, le cas échéant vers une professionnalisation des études, via la licence professionnelle ou le futur master professionnel, aspect sur lequel a insisté la dernière conférence de Berlin.

Concernant l’objectif de démocratisation des études, M. Olivier Vial a exprimé sa défiance face aux « conventions ZEP », mises en place par l’Institut d’études politiques de Paris (IEP), dispositif qui a conduit à réduire la part des bourses de mérite attribuées sur critères sociaux aux autres étudiants.

Il a souhaité que, sur le modèle de l’IEP d’Aix-en-Provence, les grandes écoles privilégient ainsi l’ouverture de classes préparatoires d’été intégrées, afin de permettre aux étudiants les plus défavorisés de se préparer aux concours.

Quant à l’aide sociale, il a indiqué qu’elle devait être clarifiée, alors que le plan social étudiant mis en place par M. Jack Lang avait conduit à un système peu lisible, mais aussi dissociée de l’aide familiale. M. Olivier Vial s’est ensuite inquiété de l’amélioration des conditions de logement des étudiants, non seulement au niveau du logement social, qui n’offre que 150.000 chambres, et pour lequel un plan ambitieux a été initié, mais aussi au niveau du parc locatif privé, peu adapté au développement de la mobilité des étudiants.

Abordant enfin le sujet de l’autonomie des universités, M. Olivier Vial a souhaité que toute réforme en ce sens ne soit pas précipitée, indiquant qu’elle devrait être le plus largement expliquée au préalable et s’accompagner de garanties suffisantes, en termes d’évaluation notamment, alors que les répercussions des rapports du Conseil national de l’évaluation ne sont que très faibles, afin de ne pas reproduire au niveau des universités la situation observée dans quelques centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS), autonomes, qui détournent les recommandations du CNOUS (centre national des oeuvres universitaires et scolaires), ce dernier étant dépourvu de réels moyens de coercition.

A l’issue de cet exposé, un large débat s’est engagé.

M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis des crédits de l’enseignement supérieur, a d’abord tenu à souligner le caractère relatif des inquiétudes alimentant le mouvement actuel de réaction des étudiants. Evoquant le problème de l’échec au niveau des premiers cycles, il a salué les efforts engagés à partir de cette année en vue d’y remédier, que ce soit par l’amélioration de l’orientation post-baccalauréat ou le développement de modules de culture générale. Il s’est enfin interrogé sur les modalités selon lesquelles l’UNI envisageait une éventuelle réforme de l’autonomie des universités, au niveau de la gestion, de la dévolution du patrimoine, de l’évaluation ou de la contractualisation avec des tiers, laquelle pourrait conduire à une meilleure intégration de l’université dans son environnement, et donc à faciliter l’insertion professionnelle des étudiants.

M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur spécial du budget de l’enseignement supérieur pour la commission des finances, a apprécié la volonté de l’UNI de renforcer l’insertion de l’université au sein de l’environnement européen et professionnel. Il a ensuite exprimé son incompréhension face à certains discours stigmatisant un budget pour 2004 en régression, alors même que celui-ci s’inscrit, pour la première fois, en progression, par un transfert de 100 millions d’euros de l’enseignement scolaire vers l’enseignement supérieur. Au sujet des conditions de vies des étudiants, tout en soulignant l’enjeu de plus en plus crucial du logement, il s’est interrogé sur la pertinence d’envisager la mise en place d’un plan pluriannuel dans ce domaine. Il a enfin exprimé son étonnement face aux mouvements de contestation estudiantins, faisant remarquer combien l’archaïsme de la loi de 1984 rendait difficile pour les universités la réalisation de projets communs entre établissements ou le renforcement de la participation des entreprises et collectivités territoriales.

M. Jacques Legendre s’est alarmé du très faible taux de réussite de certains bacheliers au niveau des premiers cycles universitaires, faisant observer que cela reposait sur un mauvais choix d’orientation. A cet effet, tout en rappelant que la réforme Haby prévoyait d’instaurer des baccalauréats en partie optionnels, il a souligné la nécessité de préparer l’orientation vers le supérieur dès le second cycle du second degré. Il s’est ensuite interrogé sur l’opportunité de maintenir l’accès de tous les bacheliers à toutes les filières, y compris celles dans lesquelles leurs chances de réussite sont très faibles, avant de s’enquérir de l’efficacité des services d’orientation au sein de l’enseignement supérieur, qui constituent la clé de l’insertion professionnelle des étudiants.

Mme Annie David a tout d’abord exprimé ses inquiétudes quant au système LMD, lui préférant l’élaboration d’une grille d’équivalence entre les diplômes européens, ainsi que face aux possibilités plus grandes de mobilité que ce système induit, lesquelles constituent également un facteur d’inégalités si elles ne sont pas accompagnées d’un renforcement des bourses à la mobilité.

Elle s’est, en outre, préoccupée de la qualité de vie des étudiants, confrontés tant à des problèmes de logement que de santé, et a suggéré en ce sens l’instauration d’une allocation d’autonomie pour les étudiants.

A ce titre, M. Jacques Valade, président, a souligné que le processus d’harmonisation des diplômes n’impliquait en rien une obligation de mobilité, mais élargissait cette possibilité ainsi offerte aux étudiants d’apporter un « plus » à leur parcours, sans pour autant que celle-ci ne devienne un facteur de discrimination.

En réponse à ces intervenants, M. Olivier Vial a apporté les précisions suivantes :

– si l’UNI est favorable au principe du renforcement de l’autonomie des universités, dans la mesure où elle permettrait, par l’association de partenaires extérieurs représentant les collectivités territoriales ou le monde de l’entreprise, une meilleure insertion de l’université dans son environnement, la réforme n’apparaît pas comme une question urgente, d’autant que le texte actuel continue de susciter de nombreuses crispations au sein du corps professoral ;

– si des mesures comme la globalisation du budget, qui dotera les universités d’une plus grande souplesse de gestion, sont essentielles, elles n’en demeurent pas moins des mesures techniques qui, pour la plupart d’entre elles, pourraient relever de la voie réglementaire ;

– la communication relative au projet de budget pour 2004 a témoigné de l’ampleur de la désinformation ambiante ;

– si la décentralisation en matière de logement social étudiant constitue une bonne initiative, l’idée d’un plan pluriannuel relatif aux conditions de vie des étudiants apparaît également comme une idée intéressante ;

– en matière d’orientation, l’UNI propose la création d’une agence nationale, indépendante, qui serait chargée d’évaluer les taux de réussite et d’insertion professionnelle selon les filières, afin d’offrir aux futurs étudiants une information complète et objective, susceptible de lever leurs incertitudes et leurs illusions, et de leur éviter une orientation vers des filières à très faibles débouchés ;

– le processus d’harmonisation européenne des diplômes conduit à renforcer les procédures d’habilitation des diplômes, et donc à relever le niveau d’exigences requis ;

– afin de développer la mobilité, le ministère a déployé des efforts conséquents, par la mise en place d’un plan social d’accompagnement de la réforme LMD, traduit par l’augmentation des crédits des bourses, ainsi que par la création d’un Conseil national pour le développement de la mobilité internationale des étudiants ;

– la création d’une allocation d’autonomie, qui serait égale pour tous les étudiants, quels que soient les revenus de leur famille, serait une mesure injuste, à laquelle doit être préférée l’idée d’une aide personnalisée visant à rénover les critères sociaux d’attribution des bourses, lesquels datent de 1945.

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