Il faut redonner aux gens le sens de l’Etat, de sa souveraineté et le goût de l’effort

Par UNI Archives

Le 9 mai 2010 à 22h04

UNI

Je partage l'article

Pierre Mazeaud, président de la Fondation Charles de Gaulle, ancien président du Conseil constitutionnel et membre du comité d’honneur de l’UNI, répond à nos questions.


– Avec la crise mondiale, le gaullisme semble redevenir d’actualité. Pour vous, qu’est-ce qui constitue aujourd’hui encore l’originalité du message du général de Gaulle ?

Il est difficile de résumer en quelques mots le message du général de Gaulle. Je dirais qu’en réalité, il faut être fidèle à ses propres convictions. C’est un message que nous a laissé le général à travers tous ses actes. Il a, aussi, montré que parfois il faut savoir dire non, comme il l’a fait le 18 juin 1940.
Vous me dites qu’il y a une sorte de soif de retour au gaullisme. Je le pense aussi, mais je ne suis pas sûr que cela soit aussi manifeste que vous le dîtes. Les générations actuelles se trouvent de plus en plus éloignées de la période historique du général de Gaulle, et elles ont développé des sentiments différents à l’égard de l’Etat, de l’Europe et de la mondialisation. Comme vous, je pense, sans être si optimiste, qu’il faut revenir aux fondamentaux du général. Non pas d’une véritable politique gaulliste comme certains peuvent le dire, mais plutôt d’une philosophie gaullienne : redonnez aux gens le sens de l’État, de sa souveraineté, et le goût de l’effort.

– Lorsque vous avez inauguré l’Historial, vous disiez que la jeunesse devait faire sien le message du général de Gaulle, en l’adaptant pour le faire vivre. Aujourd’hui, quelle forme prendrait-il ?

Certains font parler le général en disant : « le général n’aurait pas fait ça ». Aujourd’hui, qui peut dire ce qu’il aurait fait face à telle ou telle situation politique ? Il y a des évolutions dont on est obligé de tenir compte. Il faut réadapter ce message en fonction du contexte actuel. Quand je parle de réadaptation, c’est plutôt d’une réappropriation dont il est question, en fonction de la conscience prise par chacun et chacune d’entre nous de ce qu’a été l’œuvre du gaullisme.

Il y a de l’espoir, car j’ai l’impression que l’on assiste à un renouveau. La prédiction de Malraux se révèle exacte : le XXIème siècle sera un siècle spirituel. Je dirais que dans la recherche de certains fondamentaux en matière politique, qui touche aussi les individus quand ils exigent le maintien de leur conviction, il y a une sorte de retour au spirituel.

C’est pour ça que j’espère qu’il y aura un retour au gaullisme. La question est de savoir si pour que cela arrive, il ne faut pas que la situation aille encore plus mal. Je ne dis pas que l’on touche le fond, la France a vécu d’autres drames dont elle s’est relevée, notamment celui de 1940. Cependant, la situation actuelle, qu’il ne m’appartient pas de détailler, m’inquiète.

Alors, si les gens peuvent revenir au gaullisme, c’est une bonne nouvelle. À la Fondation, on s’efforce, comme vous à l’UNI, de défendre ces valeurs incarnées par le gaullisme.

– Le message du général a été ,comme vous l’avez rappelé, fondé sur un Non. L’aspect « rebelle » du message du gaullisme n’est-il pas en train de s’affadir sous le poids des éloges et du consensus qui entourent les valeurs du gaullisme ?

Tout le monde est gaulliste ou le sera. Cela signifie que chacun d’entre nous l’a été, l’est ou le sera. L’ennui, c’est que l’on ne trouvera pas dans notre pays un jour où tous le seront en même temps, ce que je souhaiterais.
Je vais vous dire quelque chose qui va vous étonner parce que c’est un point sur lequel que je me sépare du général de Gaulle. Il a fait une grande erreur avec l’élection présidentielle. Il n’avait pas besoin de cela pour sa propre légitimité et il s’en est rendu compte trop tard quand il a dit : « Après moi, le trop plein. » Et où en sommes-nous aujourd’hui ? Toute la politique française n’est basée que sur la présidentielle ! Chaque parti veut son candidat. Ils en ont même plusieurs. Alors que le général était tout à fait opposé au régime des partis, ne l’a-t-il pas finalement exacerbé ?

Il faudrait sortir un peu de cette situation. Je sais bien que l’on ne changera pas les institutions : l’élection présidentielle est là et les Français y sont très attachés. Afin de limiter ces dérives, nous devons rappeler que la seule chose qui compte, c’est le sens de l’Etat. Est-ce que celui qui va diriger le pays a vraiment le sens de l’État ? J’ai peur que tout ceci ait un peu disparu.
Alors, je vous le répète, est-ce que l’on a vraiment touché le fond ou pas ? Vous avez parlé de la crise. On ne connaît pas exactement tous ses effets, car elle n’est certainement pas terminée. Mais on voit bien que le problème du XXIème siècle, qu’il y ait crise ou pas, c’est le chômage. Comment trouver du travail pour tout le monde dans notre pays, avec la concurrence des pays émergeants, avec l’immigration, etc. Le monde est difficile.

Dans ce contexte, qu’est-ce que le gaullisme peut apporter ? Incontestablement, une grande sérénité face à ces problèmes, le maintien de la souveraineté de l’État et le sens de l’Honneur.

– Vous parlez beaucoup de l’État. Même si en France les deux notions sont intimement liées, qu’en est-il de la Nation ? N’est-ce pas aussi un combat à livrer ? L’UNI a lancé, voici quelques mois, une campagne intitulée « Français et fier de l’être », qui a connu un vrai succès auprès des jeunes.

Vous avez raison de vous battre, car c’est le seul combat qui compte. C’est le pays, c’est la Nation, la république !
C’est un combat difficile, je ne peux que vous féliciter de le conduire, notamment auprès des jeunes. Mais comment faire ? Il faut avoir la foi ! C’est ce que l’on essaie de faire ici à quelques-uns on s’aperçoit bien que plus on s’éloigne de la mort du général, plus il nous importe de faire passer son message. Mais plus c’est difficile.

Cette tâche est éminemment difficile mais passionnante, surtout pour vous avec les jeunes et avec la pensée unique qui fait que, lorsque l’on pense à droite, on est maudit et rejeté par tout le monde. Même si l’on ne fait que constater des faits, les représentants de la pensée unique tentent de vous interdire et de vous faire taire ! On l’a encore vu récemment : un grand magistrat se permet de dire des choses, que par ailleurs j’approuve, et il est convoqué par le procureur général.

Face à cela, on retrouve la nécessité du courage. Il faut du courage pour répondre à cette pensée unique et dénoncer le politiquement correct. Cette situation existe depuis plusieurs décennies, mais elle ne fait que s’aggraver.

– Le gaullisme est aussi une question de tempérament. Quelles sont pour vous les principales qualités qui le fondent ?

Incontestablement le courage et l’effort. L’effort est indispensable. Si notre pays en est là ou il est, c’est peut-être parce qu’il y a eu une forme d’abandon. Je trouve que ce que vous faites à l’UNI est important, mais cela demande une grande abnégation.

Les articles que vous risquez d'apprecier...

Article lié -

Européennes : les sections organisent des conférences avec les différents partis

Article lié -

État actuel de l’Université : censurer l’UNI plutôt que de confronter ses idées

Article lié -

Nouvelle campagne d’affichage de l’UNI dénonçant la promotion du wokisme et de l’islamo-gauchisme faite par La France Insoumise dans l’enseignement supérieur