L’art contemporain ou l’art comptant pour rien

Par UNI Archives

Le 29 novembre 2006 à 22h09

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On crée aujourd’hui sur la table rase de son moi, là est l’hérésie de l’art contemporain. on cultive la négation des valeurs de l’art. Tout est art. Tout le monde est artiste. Tout ce qui est nouveau est beau. L’accélération fiévreuse de l’individualisme moderne, impose des modes puériles symptôme d’une grande misère intellectuelle et sociale.


En témoigne, la dernière biennale de Venise avec ses métaphores grossières, là un amas de polochons semés de symboles phalliques, ici un lustre monumental en “Tampax”, dont une partie est usagée.
Collages, vieux papiers, chiffons, déchets métalliques, urines, les nouvelles armes des artistes, tous les procédés sont bons pour ridiculiser l’art, le “canul’art” en quelques sorte.
Le tourbillon des innovations esthétiques “révolutionnaire” est orchestré par le marché soutenu par les médias : audace, provocation, outrance, rupture, se sont banalisées.
Promotion de l’abjection ou de l’horreur : exposition de machines à déféquer, exhibitions de mutilations volontaires, cannibalisme : photos d’un Chinois grillant et mangeant des foetus récupérés à la morgue. Scènes publiques de fornication, photos de pédophilie, délires génétiques : création d’un lapin trans-génique vert fluo en affublant l’animal d’un gène de méduse produisant une protéine de fluorescence !

Cette révolte de l’art a cependant une excuse : l’angoisse des praticiens devant l’accablante richesse des oeuvres du passé. Comment créer encore, après de tels sommets ? Ne sachant plus comment dépasser la tradition, on l’a niée.

Ce “nombrilisme” nous rend conscient de la laideur angoissante voire déconcertante de presque tout ce qui se crée, du vide artistique dans lequel nous vivons, et du désert culturel qu’engendre l’explosion du divertissement de masse. Dans cette société amorphe, sans courage, sans vraie mémoire, empêtrée par ses contradictions, affamée de paroxysmes et oscillant entre le burlesque, l’infantilisme et le tragique, la satisfaction des pulsions est devenue la norme.
Les “jeunes” naviguent dans la culture du plaisir immédiat, la culture des ténèbres, le gothique, le gore, le punck…De l’esbroufe encensé par la nomenclature dans un jargon littéraire souvent incompréhensible.
L’art ne doit plus véhiculer des idées transcendantes, il doit être progressiste, militant et remettre en cause l’ordre établi. L’art d’avant-garde se présente comme subversif et anti-bourgeois, expression ultime d’une société qui, pour satisfaire au consumérisme exacerbé qu’elle a elle-même engendré, a renoncé à la morale ascétique pour faire place à une idéologie hédoniste.

“A société de consommation, arts d’assouvissement” disait Malraux.

Nous baignons dans l’éclectisme, dans l’esprit de tolérance et du relativisme où tout est légitime en vertu du droit à la différence. Dans l’univers saturé de la publicité, on en vient à miser sur la puissance commerciale du blasphème, de la parodie…
Visite-promenade du dimanche par un public commis l’office, dont le snobisme privilégie les faiseurs à la mode plutôt que les vrais créateurs, telle est la règle. Une fricassé prétentieuse et creuse : “Je manipule le vide, je fais vibrer le néant, je suis dans le vent !” une ambition de feuille morte !

Notre époque choisit l’éphémère contre la durée, le virtuel contre le réel, la culture de la fête contre la transmission du savoir. Au nom de la liberté d’expression, on assiste à une sorte de terrorisme intellectuel, oubliant que la culture est la défense du beau, du bien, du vrai, qu’elle relève de l’éternel et de la contemplation, qu’elle se fonde sur ce qui est raffiné, supérieur.
Si le beau est subjectif, s’il est affaire de goût, comment expliquer l’existence d’un consensus autour des “grandes oeuvres”, comment des auteurs deviennent des “Classiques” et pourquoi 80 % du patrimoine mondial classé par l’UNESCO est religieux ?
Le beau est ce qui nous réunit le plus facilement et le plus mystérieusement, et de plus il réjouit nos organes sensoriels. Le beau porte au coeur, c’est un rayon d’intelligibilité qui atteint tout droit.

L’art se moque de la modernité : ce n’est ni une agression, ni un jeu, ni une tactique, ni un trucage. C’est la reproduction libre du beau, non pas de la seule beauté naturelle, mais de la beauté idéale ; c’est un lien secret entre les solitudes qui s’ignorent, un vieux langage qui parle à voix basse des choses éternelles de l’homme. Mais comment tirer l’infini du fini ? Là est la difficulté de l’art, mais aussi sa gloire : arriver à l’âme par le corps. Ce que l’artiste réussit à exprimer dans ce qu’il peint, ce qu’il sculpte, ce qu’il crée, n’est qu’une lueur de la splendeur qui lui a traversé l’esprit pendant quelques instants.
La finalité de l’art ne serait-elle pas l’expression de la beauté morale à l’aide de la beauté physique ?

Gabriel Alibert

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