Lu dans la Gazette le 19/02/09

Par UNI Archives

Le 19 février 2009 à 13h48

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Plein le fac

Mobilisation. Depuis plusieurs semaines, les universités se mobilisent. Evènement rare : profs et élèves marchent ensemble. Pour une fois, la communauté universitaire est unie contre les réformes de Valérie Pécresse et Xavier Darcos.

L’université va mal. Les réformes interviennent dans un milieu en proie au doute. D’habitude, seuls l’Unef et le SNESUP (syndicats lorgnant sur la gauche) s’activent. Aujourd’hui, face aux nombreux projets de loi, toute la communauté se soulève. Du jamais vu ! Même les profs de la fac de droit se joignent au mouvement. Seul l’Uni (penchant à droite), sans surprise, soutient le gouvernement. Si le campus parle presque comme un seul homme, ce n’est pas pour rien. Trois grands thèmes les irritent : la masterisation de la formation des profs, l’attaque du statut des enseignants-chercheurs, et au final la loi LRU (liberté et responsabilité des universités) déjà adoptée depuis le 11 août 2007.
Les assemblées générales se succèdent, la réponse ne change pas : Non. Non à la réforme de la masterisation pour la formation des profs. Aujourd’hui, pour enseigner de la maternelle au lycée, il faut un bac +3, obtenir le Capes, aller à l’IUFM, y rester un an, puis partir se confronter aux élèves mais en alternance pendant un an également. Avec la réforme actuelle, un master est obligatoire, et la formation à l’IUFM perd sa période d’alternance… Devant les élèves, pas le droit à l’erreur. Interdit de chercher ses marques et de tâtonner. Or de nombreux témoignages de jeunes profs convergent pour en affirmer l’utilité. Seul avantage de cette réforme : la paie. En effet, un diplômé d’un master gagnera plus que ses collègues rentrés dans le professorat avec une licence. Subtilité permettant une augmentation, mais sélective, privilégiant les nouveaux entrés. Pour marquer les désapprobations, le CA de l’université a décidé de bloquer les maquettes. Cette décision est grave puisque ces maquettes sont déterminantes dans la formation. La quasi-totalité des facs de France ont fait de même. Bloquer l’administration en usant de son sens procédurier…
Les instits ne sont pas contents, tout comme les professeurs de l’enseignement supérieur. Motif : l’évaluation de leurs recherches. Cette non- nouveauté entraîne tout un tas de désagréments. Les recherches, actuellement, sont déjà contrôlées. Tout d’abord en interne. Un chercheur ne publiant pas ou peu n’est pas crédible aux yeux des confrères. L’éditeur lui-même contrôle la qualité de la recherche. Si elle n’est pas concluante, elle n’est pas publiée. La renommée vient avec les articles. Toutefois, selon le Figaro (12/2/09), « seuls 76% des enseignants-chercheurs ne sont pas rattachés à des unités de recherche », pour finir sur « un quart des enseignants-chercheurs ne publient pas ». Mais que foutent ces fainéants ? Réponse à la fin du papier par le doyen de la fac d’anglais de Lyon qui affirme en substance qu’en début de carrière, les profs ont au minimum 30 ans et souhaitent « souffler un peu » (après avoir soutenu leur thèse). De plus, ils doivent préparer leurs cours. Pour finir, les profs proches de la retraite ne souhaitent pas s’investir dans des recherches fastidieuses. Nuance importante, tout de même. Mais le nouveau texte demande un contrôle plus explicite. Les commissions, en local, jugeront la qualité de la recherche. Dans ces dernières, siègeront différents universitaires n’étant pas obligatoirement eux-mêmes spécialistes du domaine étudié. Suivant l’avis du jury, l’enseignant-chercheur sera soit récompensé et se verra attribuer plus de temps pour ses recherches où « puni » et prendra des heures d’enseignement supplémentaires au détriment de ses investigations. La recherche est-elle faite forcément pour trouver ? Comment apprécier la valeur d’une réponse ? Enfin, cette commission est-elle à même de juger avec pertinence ? Sophie Béjean, présidente de l’université, indique un autre problème : « ce texte remet en cause l’unité nationale ». Face à ces questions la ministre nomme une médiatrice. « Il y a une volonté de revoir les choses. Mais les messages sont contradictoires », constate Sophie Béjean. « Cette réforme, c’est uniquement pour stigmatiser les chercheurs. Pour dire : regardez, ils ne font rien ! », vocifère Joël Mekhantar, prof de droit public et à ses heures perdues chevènementiste, qui tient d’ailleurs un blog évoquant régulièrement les difficultés actuelles sur le campus. « La loi LRU prévoyait la contractualisation des enseignants-chercheurs », signale-t-il. Ainsi, les profs perdent leur liberté de recherche. En attendant, les profs font grève tout en assurant tout de même la distribution des cours. En revanche, ils n’ont jamais donné les notes du premier semestre. Ces évaluations sont souvent attendues avec impatience, mais les profs ne plient pas. En tout cas, pas officiellement : « il n’y a pas d’incidence pour les étudiants. Beaucoup de profs donnent les notes. Pour les étudiants étrangers, comme ils ont un cursus à part, les notes leur ont été également données », décrit Damiens Deias, secrétaire régional de l’Unef. Forcément, le ton monte très vite entre étudiants : « je comprends qu’on puisse s’inquiéter, mais il ne faut pas que les étudiants soient pris en otage », s’agace Jean-Baptiste Mandron de l’UNI. « C’est de la démagogie », répond l’Unef. Cependant, tout le monde s’accorde sur un point : cette grogne est la suite logique de la LRU. Cette loi a été adoptée en août dernier, non sans mal. La fac avait été bloquée, puis ouverte de nouveau. La mobilisation sur le long terme avait fait défaut. Mouvement déstabilisé par des partiels approchant dangereusement. A l’époque, les syndicats avaient dénoncé les effets pervers de cette réforme. Aujourd’hui, pour calmer la colère de tous, « il faut une annonce précise pour que le mouvement entende un message clair », informe Sophie Béjean. Ces réformes successives fixent un même objectif : améliorer la notoriété de nos facultés. Comme l’argent manque cruellement dans la recherche, il est plus pratique d’isoler quelques laboratoires rentables et leur donner un maximum plutôt que d’éparpiller la même somme sur différents endroits. Cependant, cet objectif n’est pas celui de la tradition française. Il est inconcevable pour nos universitaires de privilégier certaines disciplines et d’ en laisser d’autres sur le bas-côté. Souvent, on compare nos universités avec celles de nos voisins pour finir sur le même constat : l’herbe est plus verte dans les autres campus. Si la qualité de nos chercheurs qui font celle de nos universités, était si contestable, comment expliquer la fuite des cerveaux ? Généralement, les mauvais produits s’exportent mal !

par Jérémie Demay – 19/02/2009

La Gazette de Côte d’OR

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