Valérie Pécresse répond aux inquiétudes des directeurs d’IUT

Par UNI Archives

Le 28 août 2008 à 20h14

UNI

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Permettez-moi avant tout de vous remercier pour votre invitation. Votre assemblée est un lieu de débat, de réflexion, de prospective.

Travailler ensemble sur la place, l’identité et les missions des filières technologiques de l’université est une des priorités de mon ministère. Je sais pouvoir compter sur votre mobilisation et je me réjouis de participer à ce moment fort de votre rentrée.

– Une mission historique de formation et d’insertion

Voilà plus de quarante ans que notre système universitaire s’est doté d’instituts universitaires technologiques, avec une seule exigence : une formation de pointe qui donne un emploi à ses diplômés. Ce défi, Mesdames et Messieurs, vous l’avez relevé au-delà de toutes les espérances. En 1966 13 IUT ont été créés. Aujourd’hui, nous en avons 116, 668 départements qui accueillent plus de 115 000 étudiants hors licences professionnelles. Le succès de cette filière universitaire ne s’est jamais démenti et au moment où les effectifs étudiants se réduisent, les IUT continuent d’être attractifs et verront leurs effectifs se stabiliser.

Les raisons de votre réussite me paraissent assez claires : vous avez la confiance des étudiants et de leurs familles. 76% de vos étudiants obtiennent leur DUT en deux ou trois ans ; Près de 80% d’entre eux poursuivent leurs études, tandis que les autres s’insèrent sans difficulté sur le marché de l’emploi. Vous répondez à l’impératif d’insertion que les familles attendent aujourd’hui de l’ensemble de notre système universitaire. Vous répondez à l’exigence de suivi et d’accompagnement dont nos bacheliers ont besoin, vous garantissez un diplôme intermédiaire à deux ans qui sécurise les familles.

Pour toutes ces raisons vous êtes un modèle de performance en termes de formation et d’insertion, d’autant plus crucial que vous avez su, au fil des années, devenir les fers de lance de la démocratisation de notre enseignement supérieur. Accueillir des étudiants plus nombreux dans notre université, les qualifier, leur proposer une porte d’entrée sur le marché de l’emploi, est une nécessité sociale et économique pour l’ensemble de notre Université. Les Présidents d’université, le savent bien : C’est toute notre université qui doit aujourd’hui relever le défi d’une société de la connaissance dans laquelle la qualification du plus grand nombre est impérative. L’objectif de 50% d’une classe d’âge diplômée de l’enseignement supérieur ne pourra s’atteindre sans une mobilisation totale de l’ensemble de notre université. Et de ce point de vue, les IUT ont un rôle moteur à jouer, d’autant plus décisif qu’ils ont la maîtrise d’une grande part des compétences technologiques qui sont centrales dans le monde d’aujourd’hui et qu’ils sont par ailleurs un acteur majeur de la formation des cadres intermédiaires dont l’économie a besoin.

– Une mission qui doit être renouvelée

Une étude récente de l’INSEE confirme le déplacement des inégalités sociales de l’enseignement secondaire vers l’enseignement supérieur. C’est dans les premières années d’études supérieures que se joue aujourd’hui la pleine représentation de la diversité des talents et des origines sociales. Nous avons besoin de l’ensemble de ces talents, nous devons donc assurer la promotion sociale du maximum de nos jeunes et là encore, nous le savons bien, les filières technologiques sont porteuses d’un défi particulier.

C’est pourquoi dans le cadre de mon chantier « réussir en licence », j’ai souhaité renforcer la qualité de l’accueil, du suivi et de la qualification de l’ensemble des plus jeunes de nos étudiants. Mais avec une préoccupation particulière que vous connaissez bien : le devenir de nos bacheliers technologiques. Ces bacheliers, dont le bagage social et culturel est souvent plus fragile, doivent réussir dans notre université. C’est en partie pour eux que les IUT ont été imaginés il y a quarante ans. Dans un contexte de tassement démographique de la population étudiante, comment imaginer atteindre notre objectif de Lisbonne sans ces étudiants. Je compte donc sur les IUT pour les accueillir en plus grand nombre, et surtout les y faire réussir. L’exigence de démocratisation se conjugue avec l’exigence d’élévation de notre niveau global de qualification.

Comprenez moi bien, il ne s’agit pas de mettre en difficulté une filière qui marche, forte de la sélection qu’elle opère et du recrutement de bacheliers généraux qui font une part de sa force. Il s’agit simplement de faire la place qui leur revient à ces bacheliers technologiques dont les effectifs n’ont cessé de baisser ces quatre dernières années pour atteindre moins de 30% de vos étudiants. Or ces étudiants échouent massivement dans les filières générales de l’université. Ils ont besoin de voir leurs compétences reconnues et valorisées dans un parcours d’études qui leur soit adapté.

C’est dans cet esprit que je vous ai proposé l’octroi d’un bonus de 5 millions d’euros aux IUT qui marqueraient leur volontarisme dans l’accueil de bacheliers technologiques. Je vous ai trouvé au rendez-vous de ce qui, j’en ai parfaitement conscience, constitue pour vous un effort structurel et pédagogique. Dans l’attente des résultats consolidés que nous n’aurons qu’une fois la rentrée faite, vous m’annoncez, Monsieur le Président, le chiffre de 3000 bacheliers technologiques supplémentaires accueillis dans vos départements. C’est mieux que ce nous espérions. Vous montrez, une fois encore, votre sens du service public. Je pense que ce chiffre peut encore être dépassé et vous pouvez être certains que mon ministère continuera à soutenir cet effort d’un recrutement raisonné et ambitieux.

Nous avons par ailleurs à nous préoccuper de ceux de nos bacheliers professionnels qui ont les capacités et le désir de poursuivre des études. Je salue les initiatives que certains d’entre vous mènent avec détermination pour faire réussir ces élèves. La réforme de la filière professionnelle que mène actuellement Xavier Darcos aura pour conséquence d’augmenter les effectifs de bacheliers professionnels. L’ensemble de notre système d’enseignement supérieur doit se préparer à les accueillir au sein de dispositifs qui les conduisent à la réussite.

Vous le savez, nous mettons en place un système de recrutement national informatisé, dans le cadre de l’orientation active. Ce système appelé « admission-post Bac », a fonctionné pour l’ensemble de nos filières de formation sur 12 académies. L’objectif pour 2009 est de le généraliser sur l’ensemble de notre territoire, pour faciliter l’entrée de nos bacheliers dans l’enseignement supérieur, la rendre plus transparente, plus équitable et plus conforme à leurs talents et à leurs souhaits.

Concernant les IUT, qui sont entrés de plain pied dans le système « admission post-bac », dès cette année, les premiers résultats dont nous disposons sur les voeux formulés et sur les admissions obtenues, sont riches d’enseignements. Ces indicateurs nous disent en particulier que les IUT sont les filières de l’enseignement supérieur parmi les plus sélectives avec un taux de pression de l’ordre de 4 candidatures pour une place, ils nous confirment que les bacheliers généraux restent très largement majoritaires dans votre recrutement, et qu’enfin une proportion de l’ordre de 9% des places disponibles restent vacantes dans vos départements.

Forts de ces trois indicateurs qui mériteront d’être affinés, nous pouvons travailler sur une amplification de l’accueil de bacheliers technologiques sans mise en péril des équilibres pédagogiques qui vous permettent d’obtenir les bons résultats de diplômation et d’insertion que je citais tout à l’heure.

Mais ce pari nous ne le gagnerons dans de bonnes conditions, que si nous travaillons sur le qualitatif autant que sur le quantitatif. Nous savons que vos départements industriels disposent de davantage de places vacantes et sont déjà fortement nourris d’une population de bacheliers technologiques. Inversement les formations aux métiers de service sont assaillies de demandes. Nous devons prendre en compte cette réalité et repenser la filière technologique dans sa globalité.

Nous devons nous interroger sans relâche sur la pertinence des formations que nous proposons et leur adéquation au marché de l’emploi. C’est à cette condition que nous pourrons mener une politique d’élargissement de l’offre, que de nouveaux départements d’IUT pourront être créés dans le cadre d’une carte des formations rénovée, souple et réactive.

Une carte des formations revue et corrigée

Nous devons en effet pour les années à venir, nous préparer à offrir les formations d’IUT mieux adaptées aux demandes des employeurs dans un souci de clarté et de cohérence notamment au regard de ce que proposent les formations de Sections de Technicien Supérieur des lycées qui aujourd’hui sont parfois redondantes avec les vôtres.

Vous le savez, j’ai demandé à l’Inspection Générale, en lien avec les Recteurs, de réfléchir aux conditions de remise à plat de la carte des formations courtes professionnalisantes. Forte des premiers éléments qui m’ont été transmis, je lancerai très prochainement une large concertation sur l’élaboration de schémas directeurs des formations technologiques courtes à la fois à l’échelle nationale, et à l’échelle académique. La Conférence des Présidents d’Université et votre assemblée seront naturellement étroitement associés à ce travail de mise en cohérence de notre offre de formation, que nous devons aujourd’hui mieux optimiser, mieux piloter mais aussi mieux adapter.

Et pour cela, nous devons mener une veille accrue du marché de l’emploi tel qu’il se dessine pour les dix ou vingt ans qui viennent. Métiers émergents, métiers en tension, sont pour nous les métiers de demain. Nous devons être prêts, vous devez être prêts à y préparer nos jeunes. J’ai saisi Eric BESSON pour que nous puissions assurer une veille stratégique plus efficace. Dans les prochaines semaines, le groupe « prospective des métiers et des qualifications du conseil n’analyse stratégique » doit rendre ses conclusions.

Une inscription des IUT dans les territoires renforcée

Mesdames et Messieurs, j’en suis convaincue, nous ne construirons des formations adaptées aux besoins des employeurs qu’en renforçant les liens qui existent entre les universités, les entreprises et les collectivités territoriales. Les IUT et leurs antennes sont des acteurs stratégiques de la vie économique locale. Ils animent et structurent nos territoires, en lien étroit avec les entreprises. Nous savons à quel point les PME, mais aussi toutes les entreprises comptent sur l’ensemble des composantes universitaires. Les IUT proposent une formation de qualité et de proximité. Dans le cadre des pôles de recherche et d’enseignement supérieur, cet ancrage dans le tissu social et économique local doit être renforcé. Les entreprises sont particulièrement attachées aux IUT, parce qu’elles connaissent la qualité des diplômés de DUT ou de licence professionnelle qu’elles recrutent partout sur le territoire national. De nombreux entrepreneurs siègent à vos conseils. C’est un formidable atout.

Mais ce pacte de confiance doit être sans cesse renouvelé par la réactivité des universités, leur capacité à innover, à proposer des formations en alternance, à offrir de nouveaux diplômes qui soient véritablement en adéquation aux défis technologiques de notre économie.

Les IUT dans la nouvelle université : une identité et des moyens préservés

Vous le voyez, je tiens à ce que les IUT continuent pleinement à remplir leur mission de formation et d’insertion au sein d’une Université, autonome, ancrée dans son territoire, dotées de fondations, ouverte aux attentes de ses partenaires.

L’autonomie des universités est une chance pour toutes leurs composantes. Au sein d’une université renforcée, les IUT ont vocation à rester des têtes de pont. Je tiens ici à lever toutes les ambigüités ou les inquiétudes que peuvent susciter chez certains d’entre vous la globalisation des moyens alloués aux universités. Certes les moyens fléchés disparaissent, mais les IUT continueront de disposer d’un budget propre intégré et leurs directeurs en seront les ordonnateurs secondaires. Vous le savez, les IUT seront les seules composantes des universités à bénéficier de cette autonomie budgétaire.

Par ailleurs, la réforme de la répartition des moyens que nous préparons, prendra en compte le coût plus élevé de la formation dispensée à vos étudiants, conformément aux avis que vous avez pu exprimer lors des travaux parlementaires.

Enfin, la prise en compte de la performance, notamment en matière de réussite aux examens et d’insertion professionnelle, sera un élément supplémentaire de valorisation des moyens revenant aux IUT.

Ce nouveau système d’allocation des moyens aux universités sera transparent. Vos discussions avec les présidences des universités seront donc fondées sur des bases claires et connues de tous.

Le contrat ne peut lier l’Etat qu’à l’établissement tout entier, mais vous devez être certains que mon ministère veillera au respect des règles du jeu et sera particulièrement attentif à ce que les universités préserve la spécificité et la qualité de chacune de ses composantes.

Sur ce sujet comme sur tous les autres, je reste bien sûr à votre écoute.

Nous avons à bâtir ensemble l’université de demain, une université dans laquelle les IUT sont une force dont l’identité et les moyens doivent servir un seul objectif : la réussite de tous nos étudiants.

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